Vous avez moins de chance de vous blesser lors d’un saut en parachute que pendant un match de pingpong. Ça risque juste d’être un peu plus grave, surtout si votre toile ne s’ouvre pas !
Comme des millions d’autres, le petit Manuel a connu le traumatisme de l’émigration : famille d’artistes et de banquiers catalans, les Valls quittent les favelas de Barcelone pour celles du Marais, à Paris. Déraciné, le pauvre bougre trouvera un peu de chaleur humaine au Lycée Charlemagne.
Symbole d’intégration républicaine, il décroche son bachot en 1980, malgré un 5/20 à l’écrit de français. La maîtrise relative de sa langue d’adoption ne l’empêche pas de se faire naturaliser en 1982, puis d’obtenir une licence d’histoire à la Sorbonne en 1986.
En 1980, Renaud marche à l’ombre et France Gall joue du piano debout.
Manuel Carlos lui, a des convictions : il s’encarte aux Jeunesses Socialistes, adhère à l’UNEF-ID et devient conseiller de Michel Rocard pour les affaires étudiantes. Le pauvre s’implique tellement dans la chose publique qu’il ne trouve même pas le temps de bosser au MacDo pour payer ses études.
En 85, il anime les « clubs forum » qui accompagnent le projet présidentiel de Rocard.
En 86, il est attaché parlementaire du député de l’Ardèche.
En 88, il devient conseiller régional et prend la tête de la section PS d’Argenteuil-Bezons. Il intègre le cabinet de son mentor devenu Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement, puis de la jeunesse et de la vie étudiante. Son engagement est tel qu’il devient administrateur de la MNEF, non sans être initié par quelques bons amis dans quelques loges maçonniques. La suite fait mal à la tête tellement le tourbillon s’accélère :
Délégué interministériel adjoint aux JO de 92, secrétaire national du PS, 1er secrétaire de la fédération du Val-d’Oise, adjoint au maire d’Argenteuil, conseiller en communication de Lionel Jospin, …
Contrairement à la majorité des immigrés qui se pavanent au volant de leur Mercedes aux frais de la Sécu, Manu a fait le choix de servir son pays d’adoption. Sans se soucier de ses intérêts personnels, il est presque devenu un symbole d’intégration qui dérange les partisans d’une France moins cosmopolite.
Insensibles à l’ascenseur républicain, les électeurs de la circonscription d’Argenteuil le recalent au 1er tour des Législatives de 97 !
Mais le petit Valls est plus têtu qu’une mule catalane.
Ces crétins du Nord de Paris ne voulant pas de ce métèque, il va voir dans le Sud si la misère est moins pénible au soleil : heureusement pour lui, on a infiniment plus de neurones dans l’Essonne que dans le Val-D’Oise. Il finira député-maire d’Evry pendant plus de 10 ans ! Tranquille, sans avion ni parachute, il suffisait de réunir la modique somme de 7€40 : Vous prenez la ligne J jusqu’à Saint-Lazare, un ptit coup de métro jusqu’à Gare de Lyon et c’est le RER D jusqu’à la préfecture du 9-1.
Après avoir roulé pour Rocard et Jospin, notre jeune loup se stabilise enfin. En 2003 au congrès de Dijon, il soutient le 1er secrétaire, un certain François Hollande. Un an plus tard, il se prononce pour le non à la constitution européenne, alors que Hollande défend le oui. Il finit par défendre le oui lors de la campagne référendaire de 2005, avant que le non ne l’emporte ! Toujours fidèle à son champion au congrès suivant, il rallie Ségolène Royal à la primaire de 2006…
Ces quelques erreurs d’appréciation ne l’empêchent nullement de se faire réélire à Evry. Il booste sa ville, fait feu de tout bois sur le terrain pour en changer la réputation. Il laissera tout juste une situation financière difficile à son successeur.
Mais qu’importe, son bilan parle pour lui : le jour de gloire est pour bientôt.
En tout cas, pas pour les primaires de 2011 où 95% des socialistes ont le toupet de ne pas voter pour lui. Il soutient son ami François et devient même son dircom pour les Présidentielles.
A l’Intérieur en 2012 puis à Matignon en 2014, les actions du petit Catalan sont fortement en hausse : en confiance, il dégaine le 49-3 comme un cowboy son Smith & Wesson.
Il s’enflamme au point de critiquer ouvertement le Président et de se voir Calife à la place du Calife, lequel renonce finalement à se représenter. Sa relation avec le ministre qui monte, à l’Économie et aux finances se dégrade aussi : il s’agit d’un certain Emanuel Macron…
Il n’y a qu’un pas de Matignon à l’Elysée, il suffit juste de passer les primaires de 2017. Les socialistes l’envoient au 2e tour où il se fait botter le derche par Benoît Hamon. Beau perdant, il fait preuve d’une loyauté sans faille : dès le mois de mars, il appelle à voter pour son frérot, Emmanuel Macron. Benoît et son revenu universel séduiront plus de 2 millions d’électeurs, soit 6,36 % des suffrages exprimés !
Cette fidélité lui évite de pointer au chômage. Il retrouve les bancs de l’Assemblée après un véritable plébiscite, 135 voix d’avance sur son adversaire de la France Insoumise. N’écoutant que son courage, il démissionne du PS et adhère au groupe LREM. Avec un tel pédigré, il serait indécent que Manuel Carlos reste un simple député : la France ne peut pas se passer des compétences de l’ancien 1er ministre. Il voulait être Président, il le sera ! Pas de la République mais de la mission d’information parlementaire sur la Nouvelle Calédonie.
Après 6 mois de législature, son bilan est à la mesure de cet homme d’Etat : aucun amendement et deux fois moins d’interventions en séance que la moyenne de ses collègues.
Après 1 an, il montre à tous qu’il est loin d’être le despote inflexible qui gouvernait à coup de 49-3 : homme de dialogue, il laisse la parole aux autres ; à tel point qu’il est le député du groupe LREM le moins présent aux votes de l’Assemblée (5% en moyenne). Être un grand démocrate, c’est parfois savoir s’effacer. Certaines mauvaises langues iront même jusqu’à colporter une infâme rumeur : le député de l’Essonne passerait 95 % de son temps à … Barcelone !
Une jalousie qui confine à la calomnie, surtout quand on connait l'indigence de l’indemnité parlementaire. De toute façon, dès le 25 septembre 2018, il tord le cou à cette légende urbaine en annonçant officiellement sa candidature aux Municipales de … Barcelone !
Foncièrement honnête, il démissionne de son mandat de député. Le cœur lourd et la larme à l’œil, il doit renoncer à la présidence de sa mission d’information parlementaire, deux mois seulement avant le référendum sur l’accession de la Nouvelle Calédonie à la pleine souveraineté. Les 20 000 € mensuels qu’il obtient pour mener sa campagne sont peu de chose au regard de la peine qui le ronge. Et puis il faut savoir relativiser quand on parle de chiffres, c’est 400 fois moins que le salaire de Messi !
Jadis les fachos d’Argenteuil avait recalé un pauvre immigré espagnol ; les indépendantistes catalans feront de même avec ce Français venu mettre son nez dans leurs castagnettes.
Manu est un homme libre, incompris par tous ces arriérés drapés dans leurs certitudes nationalistes. C’est comme avec ces vendus du Tribunal des comptes espagnol, qui osent révéler un dépassement de 71% du plafond légal des dépenses : une broutille d’à peine 190 000 € non déclarés, certainement inventée par des fonctionnaires tatillons en mal d’avancement.
Un homme à la stature politique internationale ne s’abaisse pas à se défendre contre d’odieuses calomnies : il préfère démissionner de son mandat de conseiller municipal de Barcelone en août 2021.
Deux ans après avoir définitivement quitté la scène politique française, il revient éclairer bénévolement les auditeurs de RMC avec des chroniques aussi truculentes qu’objectives. Son légendaire sens du devoir lui dicte de soutenir plus que jamais son grand poto aux Présidentielles qui approchent. En fait, il prépare son paquetage pour un ultime grand saut en parachute sur le Palais Bourbon. Citoyen du Monde s’il en est, il est investi par LREM dans la 5e circonscription des Français de l’étranger.
Mais ceux de nos compatriotes qui délaissent la France le font souvent parce qu’il leur manque une case. Ces abrutis ne lui accordent que 15% de leurs suffrages : quel manque de reconnaissance pour le travail accompli depuis une quarantaine d’années !
Manuel Valls s’est crashé comme une daube, son parachute ne s’est pas ouvert. C’est un sport où les accidents sont rares, mais souvent dramatiques.
Mais nous vivons dans un monde de résilience. Aux dernières nouvelles, le pauvre bougre aurait été aperçu trainant ses guêtres autour de la gare du Nord. Il paraît qu’il aurait partagé son litron de Villageoise avec JMB, un chauve au crâne enduit de chantilly…
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