Jean-Mich n’a pas pu lire les lignes sublimes émanent du prestigieux Conseil Supérieur des Programmes : Voyage au bout de la cour ou L’EPS à crédit !
Ce n’est pas possible à moins de fumer du crack.
Malgré des apparences forcément trompeuses, je n’ai rien de spécial contre lui.
Par contre, c’est bien lui qui a nommé les brillants cerveaux qui ont commis ce chef d’œuvre de projet pédagogique.
Rien que pour ça, il faudrait le condamner.
Pas le passer à la question, ça serait trop gentil.
Non, il faudrait le consigner 2H par semaine au Lycée Blaise Pascal de Brie-Comte-Robert et l’obliger à participer au cours M. Pichon, professeur certifié d’EPS : dès la semaine prochaine, il aura le plaisir de réaliser et orienter son activité physique pour développer ses ressources et s’entretenir. En d’autres termes, ce petit chenapan vivra une sacrée expérience corporelle caractéristique : la course en durée, beaucoup plus excitante que la course en sac. Un dépucelage qui fera de lui un homme capable de courir 20 minutes à 8 km/h, juste un peu lent pour échapper au joggeur sodomite qui sévit depuis plusieurs semaines dans le parc François Mitterrand.
Mais la peine serait trop douce si à partir du 6 janvier, on n’obligeait pas ce cher ministre à venir tous les jeudis de 8 à 10 dans la salle polyvalente du Lycée. Et pour faire quoi me direz-vous ?
Et bien pour réaliser une prestation corporelle destinée à être vue et appréciée.
Ça pique, surtout que contrairement à ses collègues férus d’art du cirque, M Pichon est marié à une Georgienne qui a su l’initier à la culture de son pays. Résultat, ses élèves ont le privilège de bouger leurs corps adipeux au son d’un tambourin en peau de chèvre, durant 10 séances de danse, soigneusement choisie dans le folklore d’Asie centrale.
Accordons-nous une petite parenthèse architecturale.
Vous connaissez la Cité des 4000 à La Courneuve ?
Et bien comme pour notre fantasque barbu, on aurait dû récompenser Delacroix et Tambuté, ses géniaux architectes : en plus de leurs modestes émoluments, il fallait les assigner à résidence pendant cinq ans, dans un spacieux F3 de ce petit paradis.
Mais le plus grave dans cette histoire n’est pas que M. Blanquer fasse des barres-parallèles en bras de chemise ou tente de nous faire marrer régulièrement devant les caméras. Après-tout, la tentative est plutôt méritante en ces temps moroses. Manuel Vals est bien chroniqueur à la radio, alors pourquoi notre humoriste préféré ne se lancerait-il pas dans une carrière de comique au cinéma ?
Pas forcément le nouveau De Funès, mais un second rôle célèbre du genre Galabru ou Paul Préboist, avec une gueule dont on se souvient même après un AVC. Et si Manu est réélu, que ce grand fou est nommé ministre de la Défense, il pourra toujours faire dans le comique troupier et s’inspirer de Jean Lefebre.
Bref, qu’un gars qui en a l’occasion prépare son avenir professionnel peut s’entendre.
Il a autre chose à foutre que de lire les productions littéraires de ceux qu’il a nommés. Autant se coltiner l’intégrale d’Alain Peyrefitte ou écouter Mylène Farmer un soir de déprime.
Mais que des profs d’EPS pondent des bouses pareilles !
C’est comme si cette profession n’avait de cesse que de scier la branche sur laquelle elle pourrait être confortablement assise. Alors que ça pourrait facilement ressembler à un des plus beaux métiers du monde, permettant de faire vivre un moment privilégié aux élèves.
Sans pression mais avec passion.
L’histoire de ce métier est singulière, avec des profs qui ont toujours eu le cul entre deux chaises.
Les années 50 et 60 ont vu débarquer à l’école des militaires à la retraite qui avaient besoin d’agrémenter leur maigre pension. Médecine-ball, lancer de poids, gymnastique et grimper de corde, ces glorieux anciens ne se posaient pas trop de questions avec les contenus pédagogiques !
Droits dans leurs bottes, il fallait bien préserver les quelques neurones que la guerre leur avait laissé.
Le problème se posait plus en salle des profs, quand des gaillards tatoués, coupe en brosse et survêtement, cohabitaient avec des fiottes surdiplômées en costard-cravate !
Eux qui qui avaient juste le certificat d’étude, le permis de conduire et un port d’arme à feu.
Une stigmatisation et une injustice intolérable, que l’institution a corrigées, transformant les profs de gym en profs d’EPS, et en les accueillant dans le giron de l’Education Nationale, pauvres brebis égarées de la Jeunesse et des Sports.
A mort Descartes et son Dualisme !
S’occuper des corps était devenu trop vulgaire, il était temps de s’attaquer à l’esprit.
Et puis le sport et son âme damnée, la compétition, charriaient les valeurs capitalistes que des chevelus en poncho ont courageusement combattues avec des spliffs et des guitares.
La preuve, Maxime Le Forestier a été dispensé d’EPS au collège, pour une tendinite au poignet ! Tout ça parce qu’il n’aimait pas le foot, alors qu’il avait 17/20 au macramé.
Progressivement, les profs d’EPS se sont fait une place légitime autour de la machine à café. Et ce n’est pas parce qu’on finit la journée avec des rillettes sous les bras, qu’on ne mérite pas le même salaire que les autres.
Il faut entendre un prof de lettres décrypter des vers de Racine, ou de physique vous saouler avec la Loi de Young-Dupré, qui nous donne l’angle de contact statique d’une goutte liquide déposée sur un substrat solide.
Il y a largement de quoi en mettre plein la vue à deux buses en survèt qui devisent sur le dernier match du PSG.
Mais depuis quelques années, la riposte s’est organisée.
Des choses simples se sont transformées en usine à gaz, les profs d’EPS se sont mis à faire plus de photocopies que leurs collègues d’histoire, pourtant grands fossoyeurs de la forêt amazonienne.
En une quinzaine d’heures, n’importe quel lycéen devient capable d’analyser un rapport de force, coacher, arbitrer, observer, se connaître, se programmer, et accessoirement faire un peu de sport.
Qui dit mieux?
Un prof de langue incapable de faire aligner trois mots à l'oral à un élève qui enquille sa 7e année d'anglais ? L’excellence du meilleur système éducatif du monde ne saurait tolérer le manque d’ambition qu’on peut trouver dans certaines République bananières.
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