« ERRARE HUMANUM EST, SED PERSEVERARE DIABOLICUM »
Pas la peine d’avoir fait 15 ans de latin pour comprendre cette locution.
De Sénèque à saint Augustin, en passant par Cicéron, des philosophes de tout poil nous le rabâchent depuis des lustres. Grosso modo, si tout le monde fait des bourdes, seuls les imbéciles les réitèrent…
Cette maxime a trituré les méninges de nos penseurs durant 20 siècles. La nature humaine étant imparfaite, le propre de l’homme est de se tromper. Mieux, c’est le moyen de progresser. Dans les années 70, les théories de l’apprentissage par essais/erreurs ont donné une justification scientifique au statut de l’erreur.
Un proverbe japonais nous explique que « Telle est la vie : tomber sept fois et se relever huit », tandis qu’un philosophe d’opérette nous apprend que « Celui qui se relève est plus fort que celui qui n’est jamais tombé ».
J’en parlais récemment à Garches avec un accidenté de la route tétraplégique qui n’était pas tout à fait d’accord…
L’idée, c’est de justifier nos fautes sans pour autant excuser nos négligences. Mais attention, l’entêtement dans l’erreur est inexcusable. Se corriger, c’est devenir meilleur.
Tout ça, c’est des conneries pour attardés en mal de spiritualité : je voudrais bien voir saint Augustin refuser de remettre le couvert avec Marylin Monroe ou Sénèque ne pas se déboucher une deuxième Romanée Conti. Le pochard boit jusqu’à la cirrhose tandis que le fumeur tire sur sa tige jusqu’au cancer. Il n’y a guère que le PSG qui apprend de ses erreurs…
Est-ce ainsi que les hommes vivent
Et leurs baisers au loin les suivent
Contrairement au philosophe, le poète a toujours raison…
Pollution, guerre, dérèglement climatique et surpopulation, l’état de la planète est là pour témoigner que ses habitants apprennent de leurs erreurs. Mais là n’est pas le problème qui nous préoccupe.
Les hippies qui vivent d’amour, de sexe, de drogue et de rock’n’roll ne sont plus qu’un lointain souvenir. De nécessaire, l’erreur est devenue inacceptable : pire, ne pas en faire est devenu une obsession qui finit par formater le cerveau du bon citoyen.
Jadis, les enfants rêvaient de taquiner la murène avec le commandant Cousteau, d’explorer la banquise avec Paul-Emile Victor ou de défier les cratères avec Haroun Tazieff… le moutard de ce siècle se fantasme millionnaire, footballeur, tiktokeur ou fonctionnaire… à chacun ses héros… Pourquoi prendre des risques ou s’aventurer dans quelque jungle obscure… dans quelque contrée inhospitalière… quand le principe de précaution règne en maître sur nos mornes existences ?
Lyrisme et héroïsme ne sont plus au programme.
Tout ça par la faute d’un chinois qui, en avait ras le bol-de-riz du chien. Ce perfide individu n’a rien trouvé de mieux que de manger un pangolin et déclencher une pandémie. Comme le firent certains explorateurs il y a quelques décennies : ne trouvant pas de chèvres dans les épaisses forêts du Congo, ces braves aventuriers se prirent d’affection pour des singes verts qui passaient par là… Sans savoir que le pauvre Freddy Mercury payerait un jour l’addition de ces amours contre-nature !
Ce fut l’ère joyeuse du confinement, des attestations, des masques et des vaccins. Celle de l’invention de TousAntiCovid, l’application qui allait tout changer. Qu’à cela ne tienne, Manu 1er nous promit un Monde d’après, encore meilleur que le précédent …
L’asepsie a pris le pouvoir.
On est plus payé pour agir mais pour être irréprochable.
Certains métiers ont été vidés de leur sens.
Pour un médecin, ne rien faire est préférable à un mauvais diagnostic ou un traitement inadapté… qu’importe si le policier résout une affaire du moment qu’il ne fait pas de bavure… le prof n’enseigne plus mais se doit ne pas stigmatiser les minorités qui fleurissent dans l’école de la République… médicales… transgenres… religieuses… LGBT… ne pas heurter les parents… idem pour le journaliste ou l’écrivain, s’il ne veut pas se faire désosser par une armée d’avocats… ou tabasser par un lecteur mécontent… ne pas vibrer pour sa passion, mais tout faire pour éviter les tribunaux…
Baloo est un personnage du Monde d’avant :
Il en faut peu pour être heureux
Vraiment très peu pour être heureux
Il faut se satisfaire du nécessaire
Pour vivre heureux aujourd’hui, montrons patte blanche. Nul besoin de lyrisme ou de légèreté, il suffit d’être irréprochable…
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