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A CHACUN SON APPLI



Dans les années 80, on pouvait passer deux plombes à faire la queue devant la cabine téléphonique du camping municipal de Saint-Jean-de-Monts. Tout ça pour entendre votre mère se plaindre que vous ne l’appelez jamais !

Ensuite, des pionniers numériques se sont mis à surfer sur la grande toile…

Depuis, ce n’est plus pareil : les Applis sont entrées dans notre vie ; pire, elles ont pris le pouvoir !


Trois mois d’attente si vos ratiches vous titillent, six si votre palpitant s’emballe, il ne fait pas bon souffrir au XXIe siècle. Pour un proctologue, c’est mieux si votre pot vous laisse tranquille ; ou alors il faut prendre rendez-vous chez Midas, ça ne vous coûtera même pas « la peau des fesses ». Sans oublier « .fr », pour être sûr d’arriver chez eux.

Franchement, malgré la déshumanisation galopante que nos anciens fustigent entre deux AVC, Doctolib a remis un peu d’ordre et de justice dans cette jungle médicale. C’est comme pour l’univers impitoyable des vide-greniers : essayez donc de fourguer un carburateur de tondeuse à gazon ou un service à café en authentique grès chinois dans une brocante ! Eh bien Leboncoin est là qui vous aide à trouver quelqu’un d’assez taré pour vous l’acheter. C’est miraculeux ! On trouve des gars prêts à faire quarante bornes pour venir chercher chez vous une paire d’espadrilles qui moisissait depuis des mois à la cave.


Mais tout ça c’était avant !

Avant TousAntiCovid.

Là ne on blague pas, on n’est plus dans la gaudriole ou la calembredaine !

Dans la lignée du Maréchal puis du Général, Manu, Olivier et leur clique ont su réagir alors que les Chinois avaient frappé la Nation dans ses fondements. Une armée s’est déployée en première ligne contre le virus. N’écoutant que leur courage, des hordes de « gens du secours » ont donné leur vie pour sauver la nôtre. Pas d’officiers félons, les hauts fonctionnaires de l’ARS ont justifié leurs modestes émoluments. Contrairement à l’anarchie qui régnait ailleurs, nos élites ont su juguler cette peste qui allait nous dévaster, à grands coups d’attestations et de pass sanitaires.

Cerise sur le Covid, les malheureux qui ont perdu un proche dans cette tragédie ont au moins pu revendre ses slips kangourou et ses marcels sur Vinted !


On nous promettait un monde d’après fait d’amour et de bienveillance. Au final, la sécheresse et l’inflation ont pris la relève de ce satané virus : et le désordre cellulaire ne s’est pas calmé pour autant. Le litron de coco à deux balles, le sachet de riz à trois, la vie n’est pas des plus faciles en 2023. Là encore, le numérique nous aide à remplir notre frigo.

Too Good To Go est l’archétype de l’appli gagnant-gagnant. Que vous soyez épicier, fastfood, boulanger ou restau, la loi vous oblige à remplir des bennes entières de vos invendus : ça en fait des tonnes de boustifaille !

Les employés qui se servent finissent au chômage. TGTG permet aux autres de faire les poubelles, mais sans passer par la case clodo. Pour faire des courses low-cost, pas besoin d’enfiler des fringues crasseuses et des pompes à trou, il suffit d’un clic sur votre cher smartphone.

C’est un monde merveilleux qui s’offre à vous, celui de la grande loterie du panier mystère. Si tout va bien, vous pouvez rentrer les bras chargés de sushis, de quiches au saumon et de bouteilles de smoothie ; un soir de loose, vous pouvez ramener des paquets de pain de mie à moitié secs, de la purée mousseline et six barquettes de hachis parmentier…


Toute surprise peut être bonne ou mauvaise, c’est ce qui fait la beauté du jeu.

Sur le principe, on comprend bien la logique qui prévaut : une fois qu’un vendeur de n’importe quoi a fini sa journée, il reste encore de la place pour se faire quelques euros de plus.


« Dans ton panier surprise, tu pourras trouver des viennoiseries, pâtisseries, sushis, makis, produits d’épicerie, fruits légumes, … selon les invendus du jour ! »


Il serait temps que tout le monde le comprenne !

C’est exactement ce que se sont dit une dizaine de professionnelles du bois de Vincennes. Lassées de poireauter certains jours des heures sans voir un client, ou pire, de se geler la moniche les longues soirées d’hiver, elles ont décidé de réagir. Aidées par le directeur d’une agence de création d’applications mobiles, qui a préféré conserver l’anonymat pour des raisons personnelles, elles ont donné naissance à Too Good To Fuck

Ce métier a beau être le plus vieux du monde, une touche de numérique ne peut pas faire de mal. Ces dames vont ainsi arrondir leur fin de mois, tandis que de paisibles pères de famille s’offriront une escapade romantique à moindre frais. Moyennant 15 €, il est devenu possible de se faire astiquer le dard dans une rutilante estafette, mais à quatre heures du mat.


- Tu vas où chéri ?

- J’arrive pas à dormir, je vais promener le chien.

- Mais Robert, on n’a pas de chien !


Une fois réglés ces quelques détails familiaux, Robert peut se rendre dans le poumon de l’Est parisien, l’œil qui pétille et la queue qui frétille. Non parce qu’il va se délester de quelques millions de gamètes, mais parce qu’il ne sait pas à quoi s’attendre. Comme pour les paniers, ça sera la surprise !

Bonne ou mauvaise.


Rousse, blonde, noire ?

1m43 ou 2m02 ?

39 ou 123 kg ?

18 ou 87 ans ?

Homme ou femme ?


Une fois son forfait accompli, il suffit de cliquer sur son téléphone :

« Purée envoyée »

TGTF rétorque :

« Vous venez de sauver une prostituée des griffes de la misère. »


Gagnant-gagnant !

Robert peut rentrer chez lui l’esprit léger…






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