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TA GUEULE MICHEL !



Michel est ce qu’on appelle un Français moyen.

Malgré ses 60 printemps et quelques neurones calcinés, il se souvient très bien que son cheminot de père lui conseillait il y a 40 ans de faire comme lui, entrer à la SNCF. Rêve et ambition sont l’apanage d’une jeunesse pour qui le monde du rail manque un brin de lyrisme. Surtout en ce début des années 80 où on n’avait besoin de rien…

Ce fringant sexagénaire aurait du écouter ses parents… en tout cas plus que Peter et Sloane : à plus de 70 balais, ces deux écervelés risquent régulièrement l’AVC pour se payer leur Ehpad !


Au crépuscule d’une vie professionnelle aussi fatigante que banale, il s’apprêtait à enfin lever le nez de son guidon. Le rendez-vous était même pris au printemps 2026 dans son mobile home vendéen tout équipé : une seule chose au programme, se la couler douce… C’était compter sans l’action politique d’un jeune Picard et d’Elisabeth Borne, son bras armé. Cette pimbêche a brisé son rêve d’un coup de 43.3 en lui collant 4 trimestres de rallonge entre les deux yeux.


Ces législatives sont une aubaine, l’occasion rêvée de prendre une revanche dans les urnes. Une chose est sûre, son bulletin n’ira pas à la majorité présidentielle, ni à tous les vendus qui sont venus leur manger dans la main.  

S’il s’interdit la voie du centre, il va devoir pactiser avec les extrêmes. Deux camps qui s’ auto-proclament raisonnables et matures tout autant qu’ils fustigent le radicalisme de la concurrence. L’essentiel de la campagne consiste à effrayer l’ électeurs avec les fachos du RN ou les antisémites de LFI.

Lui s’en fiche, il veut juste rejoindre son coin de paradis avant que la démence sénile ne le frappe.


Qui aurait pu croire à la renaissance d’un Front populaire ? Michel connaît la méfiance ancestrale qui oppose communistes et socialistes : la franche camaraderie qui règne dans cette coalition le fait doucement sourire. Leur accord électoral est une surprise, leur programme commun un miracle qui le laisse pantois.


- Camarades, le lendemain de notre victoire, nous bloquerons les prix de l’énergie, du carburant et de l’alimentaire de première nécessité !

- Vous ne les baisserez pas ?

- On verra plus tard. Comme les salaires augmenteront, tu seras gagnant.

- Et l’inflation ?

- S’il le faut, on fera comme en 81, on dévaluera.

- Et l’Europe ?

- … De toute façon, les salaires seront indexés sur l’inflation. Et puis tu pourras partir à la retraite à 60 ans .

- Je les ai déjà : ça veut dire que le 8 juillet je peux rester chez moi ?

- Oui, le temps de signer le décret et de le mettre en application.

- Cool ! Et avec quelle pension ?

- Ça dépend.

- A taux plein ?

- Oui, si tu as tes 42 annuités.

- Mais j’ai commencé à travailler à 23 ans !

- Mais pourquoi ?

- J’ai fait quelques études.

- Il fallait réfléchir mon gars. Tu peux toujours pousser jusqu’65 pour partir avec le max.

- Sinon ?

- Tu pars dans deux semaines avec 1400 €.

- Un peu léger non ?

- La vie est moins chère en Vendée, et ton mobile home est payé !

- Et mon Ricard ?

- Ta gueule Michel !


Loin de le rassurer, ces mots amènent tout naturellement notre jeune senior à glaner quelques informations. Chez les patriotes, environ 10 % des candidats députés ont tenus des propos racistes, antisémites ou nostalgiques d’un maréchal injustement dénigré. Après tout, il en reste 90 % de respectables ; et comme le dit Jean-Jacques, son voisin de camping : - on a encore jamais essayé.


- Mes chers compatriotes, nous allons rétablir le droit du sol, expulser les étrangers en situation irrégulière, supprimer l’AME et limiter le regroupement familial.

- Ça risque d’être tendu dans certains secteurs où on voit peu de Français.

- Nous baisserons les charges des métiers les moins qualifiés, ce qui augmentera le net. On baissera aussi la TVA sur le carburant et l’énergie.

- Un chômeur pourra ainsi faire 80 bornes par jour avec son diesel, venir faire les poubelles à Paris et correctement gagner sa vie !

- Oui, s’il est français…

- Et pour la retraite ?

- On abroge et on revient à un âge légal de 62 ans.

- A taux plein ?

- Ça dépend , tu auras tes 42 annuités ?

- Non. J’aurai une décote ?

- Mais j’en sais rien, on verra : on fera un grand audit et on prendra en compte la pénibilité.

- Mais je ne travaille pas à la SNCF.

- Ta gueule Michel !


Dans tous les cas, bosser jusqu’à 63 ans permettra à notre futur électeur de maintenir son salaire et d’ajouter des trimestres. Comme le lui suggérait Elisabeth…

Et s’il votait Ensemble ?

Il faut bien dire que le petit Gabriel a survolé les débats, comme le fit Raphaël pour les européennes…

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