Il a fallu 13 jours aux vainqueurs de la Transat en double pour traverser l’Atlantique sur leur frêle esquif.
Marre de la grisaille, ils ont décidé d’aller se boire un café à Bahia avec leur pote El Gringo.
Quelques semaines avant, le Brésil a eu la bonne surprise de voir débarquer des galettes de pétrole sur 130 de ses plages. Si cent tonnes ont déjà été « récoltées », on ne connait ni la cause ni l’ampleur de cette marée noire. Une nouvelle catastrophe écologique, à peine éteints les feux de camps que quelques scouts irresponsables avaient allumés cet été dans la forêt amazonienne.
Tout ça pour sortir leur gratte et jouer quelques notes des bossas de Joao Gilberto qui venait de nous quitter le 6 juillet !
« Tristeza nao tem fim
Felicidade sim »
Ah non, ça c’est Vinicius de Moraes…
Après deux Coupes du monde, on sait que ce pays est dans une sale période de scoumoune.
Depuis 2014, le miracle économique du géant sud-américain s’est essoufflé, et transformé en crise du même nom. L’an dernier, cerise sur la caïpirinha, les électeurs ont réussi l’exploit de dégoter un lascar encore plus inquiétant qu’un célèbre punk vivant plus au nord, dans une grande Maison Blanche.
Entre nous on s’en fout un peu.
C’est loin le Brésil, et un océan nous sépare.
Si certains farfelus à casquette de marin veulent y aller, c’est leur problème.
Chez nous tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes.
Ces incorrigibles danseurs de samba ont eu leur marée noire, nous avons eu le droit à notre marée blanche.
Depuis quelques jours, des paquets de quelques kilos, bien emballés dans du plastique, s’échouent sur les plages du littoral atlantique.
De Biarritz à Pornic, 763 kilos ont été distribués.
Pas de pétrole.
De poudre blanche, et c’est une affaire de grosse galette : de la cocaïne !
A 35 000 balles le kilo, il y en a pour la modique somme de 26 patates !
Largement de quoi se payer quelques actions FDJ.
Depuis des années, j’ai une conscience écologique qui m’honore.
Je prends des douches de moins de 25 minutes et je vais souvent faire mes courses à pieds, enfin, quand il ne pleut pas.
Une fois, j’ai même voté Verts aux élections !
C’est dire si cette fois, mon sang n’a fait qu’un tour.
J’avais longuement hésité à participer à un nettoyage collectif des bords de Marne, ou à un ramassage du plastique en forêt de Fontainebleau.
Mais là, dès que j’ai appris cette affreuse nouvelle, j’ai bondi sans réfléchir une seconde dans ma Modus diesel.
Quatre heures plus tard, j’étais à Fromentine tout près de Noirmoutier. Pas de nostalgie, pas question de passer le Pont et d’aller taper un volley sur la plage des Dames.
L’occasion est trop belle d’allier esprit sportif et éco-responsabilité.
Si on envisage de quadriller 40 kilomètres de plages dans la journée, en combien de temps serais-je au Pays Basque ?
Avec un peu de chance, il serait possible de trouver un de ces fameux ballots de plastique avant les Charentes maritimes. Ou plusieurs.
Une quinzaine de kilos, ça serait déjà pas mal pour aider les autorités à lutter contre cette singulière pollution.
D’ici la fin de la semaine, par exemple.
15 X 35, …
Non, c’est juste pour faire un peu de calcul mental, il parait que c’est un excellent remède contre la dégradation des neurones du cerveau.
Par contre, je ne suis pas sûr de connaître quelqu’un qui puisse me racheter cette marchandise. Ou m’aider à la couper avec de la farine, car il parait que cette poudre est dangereuse tellement elle est pure.
Je connais bien deux trois gars qui de temps à autre ont dû se retapisser les cloisons nasales, mais de là à les contacter pour leur proposer un petit deal !
De toute façon, on verrait bien, pour le moment il fallait nettoyer des kilomètres et des kilomètres de plages… Avec plus de chances de trouver des bouteilles vides ou des boites de thon que la précieuse marchandise.
Cette marée blanche est une fable.
Comme la Laitière et le Pot au lait, où la pauvre Perrette fait tomber son pot.
« Adieu veau, vache, cochon…
Quel esprit ne bat la campagne ?
Qui ne fait châteaux en Espagne ? »
Combien êtes-vous ?
Combien sommes-nous à nous demander ce que nous ferions si au détour d’une dune ou d’un sentier, nous trouvions un colis plein de poudre, un sac plein de biftons ou une boite pleine de diamants ?
Un cas de conscience auquel chacun a pensé un jour.
Difficile d’empêcher l’esprit de vagabonder.
De battre la campagne, ce n’est pas moi qui le dit, c’est Jeannot.
C’est vous dire si c’est vrai.