Gouverner c’est prévoir ; et ne rien prévoir, c’est courir à sa perte.
On connait plus cette citation que son auteur, Emile de Girardin.
Tout cela sans jamais avoir joué au football, ni même regardé un seul match à la télé.
Si ça se trouve, comme beaucoup, Emile n’était pas abonné à RMC Sports.
Pour les deux millions qui le seraient, on peut enfin dire que les quelques euros dont on les déleste chaque mois ne partent pas en pure perte.
La qualif de Rennes et du PSG à l’arrachée dans les phases de poule et l’exploit de l’OL contre City ont été des amuse-gueules appréciables.
Mais là, en huitième, on a changé de braquet.
On a changé de banquet.
On a remballé les rillettes et le taboulé pour sortir le caviar.
Fini le mousseux, à nous le Ruinart.
Du jamais-vu, même pour les rescapés cellulaires qui ont eu le privilège de vivre les épopées des verts ou de Bastia, plus récemment de Monaco, Marseille ou Paris.
Pour ceux qui ont choisi l’AVC, ils ne s’en rappellent plus trop.
Les stats ont beau être là pour se faire démentir un jour, on imagine difficilement Martin Fourcade faire un 0/5 au couché, même avec un ouragan alpestre. Et Mickael Jordan, mettez-lui un bandeau sur les yeux et une camisole de force, il finira toujours par mettre un panier.
C’est comme en Coupe d’Europe de foot.
Allez gagner le match aller 2-0 à l’extérieur, vous avez entre 0 et 1 % de chances de ne pas vous qualifier au tour suivant.
Si ça ne suffit pas pour vous rassurer, arrangez-vous pour que le joueur providentiel de l’équipe adverse soit suspendu, et là, vous vous rapprocherez tout près des 0%.
Mais après tout, on est encore assez loin des chances de décrocher un Jackpot au Loto ou au casino.
On peut encore sécuriser les choses.
Il suffit de priver l’adversaire de ballon, de lui interdire toute occasion de but. Ça ne garantit en rien d’en mettre un vous-même, mais au final, vous n’en avez pas besoin.
Et pour bétonner le tout, cerise sur le ciment, mettez un des meilleurs gardiens de tous les temps dans les cages, 176 sélections et 153 matchs européens, ça vous protègera contre un but casquette.
Ca fait bien longtemps que je n’ai pas ouvert un livre de maths.
Ou que je n’ai pas écouté un sketch de Bigard ne parlant pas de cul qui commence par: « On a une chance sur dix millions de se faire mordre par une chauve-souris enragée. »
Et pourtant, les miracles sont parfois là pour faire mentir les chiffres.
Je ne sais pas laquelle des deux équipes a été touchée par la Grâce divine, mais Manchester a réussi une chose invraisemblable.
Quelque chose qu’on n’avait jamais vu :
Marquer trois buts en n’ayant aucune occasion.
Avant d’aller chercher des raisons du côté de la voûte céleste, on peut toujours faire appel au hasard.
Chaque match a sa propre logique, et théoriquement, tout peut arriver.
La star qui se casse le genou en descendant du bus, le coach qui se fait piquer par un frelon asiatique, jusqu’à l’arbitre qui aveuglé par le soleil peut se prendre le pied dans un trou de taupe au moment de siffler un hors-jeu.
On a même vu certains Présidents donner un petit coup de pouce au destin avec une bonne enveloppe ou une petite mallette, mais il y a prescription.
Une équipe de Ligue 1 peut se casser les dents en Coupe de France contre une équipe de CFA. Onze gars qui mettent les barbelés derrière, en fin d’après-midi d’un dimanche morose de janvier. Avec tranchées, champ de labour et cassage de tibia, la qualification est parfois au bout de la prolongation.
A la 118e minute, ou aux pénaltys.
Mais là !
Comment trouver des explications à cet exploit invraisemblable des parisiens.
Certains avancent la peur, la trouille, la chiasse.
Le syndrome de la remontada, attrapé deux ans avant au Camp Nou.
Des joueurs choyés, adulés et surpayés alors qu’ils n’ont rien gagné en dehors de l’Hexagone.
Un Président et des cadres qui manquent de caractère.
Un club qui s’éloigne de son ADN.
Chacun peut y aller de sa petite explication, mais revenons un peu à Mimile.
Un jour qu’il visitait la Tour Eiffel, un Emir décida de faire mumuse et de lâcher quelques centaines de millions.
Mais pas n’importe comment, en respectant certains principes forts !
Changer quatre fois d’entraîneur sans en laisser un seul aller au bout de son contrat. Et quand c’est possible, le prolonger avant de le virer.
Etoffer son palmarès d’un record, celui du transfert le plus cher. Non pas une fois, mais deux le même été, pour la modique somme de 400 patates.
Ne pas dépenser dix fois moins pour trouver et garder quelques joueurs de devoir à des postes moins prestigieux.
Faire signer deux quadras pas bien loin de l’écurie pour apporter un plus dans le vestiaire et stabiliser des stars parfois fantasques.
Et le résultat de choix aussi marqués ne s’est pas fait attendre, le miracle est arrivé.
Dès la deuxième minute, Thilo Kehrer fait une passe décisive, à l’adversaire.
Puis Gianluigi fait une toile digne de Loris Karius, qui lui aura eu le talent de les faire en finale.
La mimine de Kimpembe qui offre la qualif aux Red Devils.
Neymar n’est pas là, il s’est blessé en Coupe de France. Heureusement, il a pu faire une petite fête pour son anniversaire puis partir se reposer un peu au pays.
Mbappé enfile les buts en Ligue 1, mais s’est trompé de crampon pour ce match.
Cavani rentrera quelques minutes.
Que des choses qu’on ne pouvait pas prévoir.
De là à courir à sa perte…