Les obscurantistes d’aujourd’hui sont souvent les modernes d’hier, ou de demain. A moins que ça ne soit le contraire.
Par exemple, on nous a expliqué, preuves médicales à l’appui, qu’un verre de vin à chaque repas était une manière de lutter contre une dégénérescence cellulaire qui n’est pas la meilleure amie de l’homme. La chienne !
Le tout lu dans « ELLE », entre Bussy- Saint-Georges et Val d’Europe sur le RER A, et alors que certains érudits d’outre-manche rassurent notre conscience en nous disant que le whisky est bon pour nos artères.
Si on ajoute à ça qu’une bière ce n’est pas de l’alcool et qu’au sud de la Loire, le Ricard est bon pour les intestins, on se dit que le meilleur moyen d’être en bonne santé, c’est sûrement de picoler toute la journée.
- Eh Maurice, tu remets la culotte au môme !
- Alors ça nous fait deux jaunes, une pression et trois ballons.
- C’est ça, combien jte dois ?
- 19 centimes.
- Quoi, c’est déjà ta tournée ?
- Non, c’est celle de la Sécu, donne-moi ta Carte Vitale.
Franchement, la vie serait belle si l’Assurance maladie prenait vraiment le taureau par les cornes et comprenait enfin, que le meilleur moyen de lutter contre son déficit abyssal, c’est la prévention !
Et on peut regretter la demi-mesure qui consiste à financer les cures thermales de quelques grabataires qui de toute façon n’en ont plus pour très longtemps.
Pourquoi ne pas mettre le paquet sur les forces vives de la Nation, et comme pour la CSG, mettre une carotte aux retraités ?
Aux caisses du Décathlon de Pontault-Combault, le plus beau du monde :
- Vous le réglez comment Monsieur votre B’TWIN Ultra 940 CF, espèces ou carte ?
- Il fait combien ?
- 3800 €.
- Bon ben je vais faire une Carte Vitale.
Ou au comptoir Air France de CdG :
- Bonjour, je voudrais un aller-retour Paris / Victoria.
- Aux Seychelles ?
- Oui, en Business svp, j’ai un peu mal au dos.
- Ca fait 7 625 € Monsieur.
- Vous prenez la Carte Vitale ?
- Oui, bien sûr.
Et dire que certains pisse-vinaigre osent nous dire que Mélanchon abuse avec ses notes de frais. Ou qu’importe le flacon, pourvu qu’on ait une molécule d’éthanol !
Savent-ils ces ignares coincés, que la carte Navigo s’arrête à 5 zones, et qu’il y a un peu plus d’un demi-siècle, on servait généreusement du pinard à la cantine des écoles primaires !
Dans ce monde impitoyable où l’individualisme fait tant de ravages, heureusement que certaines initiatives réchauffent nos cœurs meurtris.
Sans vous raconter ma vie, j’ai une confidence à vous faire, parfois ma conscience me joue des tours.
Malgré cette pudeur qui m’honore, je dois vous avouer que j’ai une vie sportive dissolue. Je joue au tennis avec des partenaires multiples, et pas toujours sans prendre de précautions.
Parmi eux, il y a un pauvre bougre, juste un peu plus âgé que moi, jeune retraité d’une grande Compagnie de grands enfants qui n’ont toujours pas renoncé à jouer au train électrique.
Le corps usé par de longues années derrière un bureau, même pas en acajou, le malheureux est obligé, outre la petite balle jaune, de faire du tir à l’arc, du jogging et de la natation pour s’éviter trop d’arthrose ou un AVC.
Plus terrible encore, même pas sûr d’y parvenir, il pousse la punition jusqu’à partir régulièrement en voyage dans des contrées aussi lointaines qu’incertaines.
Le pauvre.
Jamais plus il ne connaîtra les joies du camping municipal de la Tranche sur mer, c’est vraiment inhumain !
Parfois, quand sonne mon réveil et que j’ai la chance de partir au travail, j’ai une pensée triste pour lui, cloué au lit chaque matin.
Je me dis que cette société est injuste.
Mais vivre dans mon coin, arcbouté sur mes petits privilèges, m’est devenu intolérable.
Il est temps de réagir, et pas seulement dans les urnes.
Avec un groupe de potes, qui j’espère deviendra grand, nous avons courageusement décidé de faire preuve de plus de solidarité.
Dans trois ans, je partirai à la retraite !
Je sais, ça risque d’être difficile.
Mais ma décision est prise, je ne peux plus laisser ces pauvres agents seuls, honteusement mis au placard à 57 ans.