top of page

KOMM JEJTZ


C’est vraiment con l’Australie.

Et je vous le prouve : vous allez dans votre grenier et vous ressortez votre vieux globe terrestre, bien poussiéreux entre une machine à coudre et un authentique masque africain made in China.

Après avoir, comme il se doit, éternué à 200 km/h pour les plus rapides, vous dévalez les escaliers qui vous mèneront dans votre garage. A condition de ne pas vous vautrer et finir aux Urgences conviviales de l’hôpital de Juvisy sur Orge, vous allez au garage.

Pour les plus chanceux, une puissante berline allemande repose les 300 bourrins qu’elle a sous le capot, mais là n’est pas le problème. Après une palpitante partie de cache-cache, vous remettez enfin la main sur votre vieille chignole. Celle dont vous avez hérité avec émotion de votre papy bricoleur.

Vous tournez le globe d’un quart de tour de manière à placer la France en haut, dans la position la plus élevée, là où elle était il y a plusieurs siècles, avant que d’irrespectueux étrangers nous délogent.

Les salauds.

Vous demandez à votre femme, ou à votre voisin si elle est partie, de tenir fermement la sphère. Armé de votre chignole, vous percez un trou à la verticale de l’hexagone. Faites vraiment attention à ne pas percer votre voisin, ça vous donnerait une deuxième occasion d’aller à Juvisy, sa plage, ses remparts,…

Et bien devinez un peu où ressort la mèche galvanisée de votre outil ?

En Australie !

Et oui.

Tout ça pour dire que pour voir mon idole taper dans la petite balle jaune, j’ai dû regarder la télé en fin de matinée, alors que ce quart de finale de l’Australian Open avait lieu en soirée !

Mais là-bas.

Mais mon propos n’est pas dans une brillante et scientifique démonstration de ce que sont les antipodes, et de leurs conséquences déplorables sur le décalage horaire.

C’est plus pour vous dire que de regarder la télé le matin est un piège redoutable pour anesthésier votre dynamisme et revoir à la baisse cet ambitieux programme journalier.

Les feuilles mortes de mon immense jardin attendront encore un peu pour enfin être ramassées à la pelle. Tout comme ma housse de couette pour son stage dans la machine à laver. Quant à la suite du rangement général courageusement initié il y a quelques mois, il faudra patienter encore quelques temps.

Roger est nerveux.

Il ne réussit pas à étouffer son adversaire dès les premiers échanges.

Thomas Berdych joue un tennis parfait et l’impudent pousse même l’irrespect jusqu’à prendre le service du Maestro dont le visage semble un peu fermé.

La défaite de Rafa, son meilleur ennemi fait de lui le favori logique de ce grand chelem, qui pourrait être son vingtième.

Mais le Tchèque aux yeux si clairs, plus blond que jamais, va trembler au moment de conclure au service la première manche.

Un peu l’histoire de sa carrière.

Il faudra quatre balles de set au Suisse pour recoller au score, et pour nous d’entendre pour la première fois du match son fameux « Komm jetzt ! ».

Celui qui prouve que les mouches ont changé de coche, à moins que ça ne soit d’âne.

Et là, le récital peut vraiment commencer contre un adversaire qui pourtant jouait jusque-là le tennis de sa vie.

Une vitesse de balle, une fluidité, une inventivité et des déplacements qui sont parfois plus proches de la création artistique que du sport.

Qui en tout cas confinent à la perfection.

Roger fait partie de ces rares athlètes qui brouillent la frontière entre les deux mondes.

DIVIN.

Et ce d’autant plus que, comme un célèbre barbu, ce joueur est revenu il y a un an d’entre les morts du sport, après six mois d’arrêt et trois ans sans titre majeur.

Une résurrection.

Là-aussi.

L’air des montagnes valaisannes et une nouvelle raquette lui on même fait changer son jeu à 34 ans.

S’il matte un Coréen quasi inconnu qui s’est invité en demie, il devra se venger d’un Croate qui jadis le priva d’un US Open.

Komm jejtz Roger !

Si tu vas au bout de ta vingtième, je serai avec toi.

Et j’aurai sûrement les yeux qui piquent lundi prochain.

C’est loin l’Australie.

You Might Also Like:
bottom of page