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571 MILLIARDS


On ne parle pas de patates.

Mais bien de milliers de patates…

Décidément, les 500 qui ont le plus d’oseille sont beaucoup plus malins que les 66 809 500 autres.

En vingt ans, ils ont su multiplier leur bas de laine par 7, le portant à 571 unités, quand ces crétins de pauvres ont pour les plus chanceux à peine économisé de quoi partir s’entasser deux semaines dans un mobil home à Saint-Jean de Mont. Alors qu’il reste quelques villas de 450 m2 à louer dans les Grenadines. Et le pire, c’est qu’ils récidivent les onze autres mois et demie de l’année en s’agglutinant dans de merveilleux quartiers franciliens ou d’ailleurs, tandis que le marché de l’immobilier est redevenu dynamique sur l’Ile Saint Louis. L’autre jour je levais les yeux après avoir léché le fond de ma coupe de sorbet betteraves de chez Berthillon, et j’ai vu au moins trois appart à vendre ! C’est dire que si on cherche un peu, on trouve.

Et encore, on ne parle que de la France, dont la devise affichée au fronton de tant d’édifices publics est pourtant si claire. On comprend assez mal dans de telles conditions la lenteur de certains de nos compatriotes qui gagnent en un mois ce que certains empochent en moins d’une heure. Les chiffres sont éloquents, beaucoup trop de français perdent leur temps.

Ce qui semble encore possible dans quelques républiques aussi démocratiques que bananières, parait de moins en moins probable dans nos latitudes plus tempérées. Certains auront beau passer leurs nuits sans s’allonger dans leur superbe lit ikéa, le grand soir n’est pas pour demain la veille. Plus de trois siècles après avoir raccourci quelques privilégiés, le peuple aura bien du mal à priver Nanard de sa tête de vainqueur, simplement parce qu’il vient de reléguer l’héritière de l’Oréal à la deuxième place. Quant à cette pauvre Liliane, comment envisager de lui couper ce qu’elle a visiblement perdu depuis un petit moment ?

Je proposerais bien à tous de faire la grève du Ricard cet été, mais ça ne servirait à rien : le petit jaune n’appartient même pas à LVMH. Personnellement, j’ai trouvé la parade. Je ne boirai pas le moindre verre de Cheval Blanc ni d’Yquem lors de ces nombreux BBQ estivaux qui se profilent. Pas plus que pour les printaniers d’ailleurs. Il est hors de question de se soumettre à cette odieuse dictature des champions du CAC.

Plus sérieusement, il reste l’insoumission aux électeurs majoritairement abstentionnistes que nous sommes. Jean-Luc, notre Chavez sans cravate, aura bien du mal à mettre des bâtons dans les roues d’une assemblée en marche, mais il a déjà pris date et s’est engagé à porter le fer dans la rue chaque fois que Manu écornera le moindre article de notre Code du travail. Le troisième tour social à défaut d’avoir pu accrocher le deuxième des présidentielles.

Etre contre tout, la pauvreté, la guerre, le chômage, le nucléaire, le mondialisme, la cinquième République et tant de choses révoltantes est une posture tentante. Mais qui ne devrait dispenser personne d’être pour quelque chose, une force de proposition réaliste pour changer ce monde, les pieds sur terre et la tête dans les étoiles.

Il y a, me semble-t-il chez les insoumis et révoltés de tous bords, aussi peu d’utopie que de mesures concrètes qui tendraient à changer ce monde moyennement équitable.

Le chômage est une gangrène qui depuis le deuxième choc pétrolier ronge les fondations du modèle à la française. Si les uns pensent le réduire en lâchant du lest sur le CDI, les autres n’attendent que ça pour investir la rue. Précarisation contre sécurisation, il reste aujourd’hui assez peu de monde pour rappeler que, quel que soit le statut d’un salarié, l’essentiel pour son entreprise est ce qu’on appelle le carnet de commande. Que ce soit en stage, en CDD, en intérim, en CDI ou en ce que vous voulez, il n’y a pas une boite qui embauchera quelqu’un s’il n’y a pas de taf.

Et pour le salarié me direz-vous à juste titre ? Malheureusement, nous vivons des temps incertains, où le CDI est un sésame qui ouvre toutes les portes, en particulier celles du logement et du crédit. Quasiment la seule chose possible pour se construire une petite vie pépère, sans que papa et maman ne crachent au bassinet.

Je sens que je vous vends du rêve…

- Qu’est-ce que tu veux faire plus tard mon chéri ?

- Je sais pas trop papa.

- Médecin, avocat, prof ?

- Non plus tard je veux être fonctionnaire.

- Tu sais très bien qu’on n’en engage plus trop !

- OK, je serai CDI alors.

On se fiche presque du métier, ce qui compte, c’est le contrat de travail. Ouah, quel monde merveilleux que celui où la perspective la plus joyeuse est décrocher un CDI pour pouvoir royalement s’offrir un F2 à Melun. Et encore, estimons-nous heureux, ça aurait pu être à Fontenay Trésigny.

Les dix plus riches s’enrichissent plus vite que les 500, qui le font plus que les 10 %, …qui le font plus que les chômeurs, qui le font plus que les migrants.

Finalement, on est tous le privilégié de quelqu’un, et les castes supérieures deviennent de plus en plus inaccessibles aux importuns qui auraient la mauvaise idée de caresser l’espoir de grimper à l’échelle sociale.

Si ça continue comme ça, en 3097, il ne restera qu’un riche, qui le sera immensément puisqu’il possèdera 99 % des richesses du pays. Et qui sait un jour, du monde…

Au final ceux qui sont censés défendre nos intérêts sont sur le point de s’arcbouter pour sauver nos vies, et nous ne les en remercierons jamais assez.

- C’est bon Robert, tu vas signer ton CDI demain.

- Merci Michel, c’est vraiment une bonne nouvelle.

- D’autant que tu seras bien dans cette cimenterie.

- C’est clair, j’ai de la chance, j’aurais pu taffer dans un abattoir.

Du rêve on vous dit.

Ça me fait penser au mariage, et à la pression qu’on pouvait mettre à certaines jeunes filles, dans certaines régions, familles, époques ou cultures. Pas d’autre objectif que de de s’unir, peu importe avec qui, quitte parfois à forcer ou arranger les choses. Sans trop regarder avec qui, comme pour le CDI.

- Dis bonjour au Monsieur ma chérie.

- Bonjour Monsieur.

- Tu peux m’appeler Maurice.

- Pourquoi vous me regardez comme ça ?

- Je suis ton futur mari.

- Ah j’ai eu peur.

- Il n’est plus tout jeune, mais tu verras, il a l’air gentil. Et puis tu vas enfin pouvoir faire des enfants, donner un vrai sens à ta vie.

- Merci maman.

Une union souvent plus proche du CDD que de cette promesse d’amour mutuel et de respect pour la vie.

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