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STEVEN ET MONZA


Le handball a toujours été un sport sympa où trinquer avec un joueur de l'équipe de France à la buvette d'un tournoi bucolique de fin de saison n'a jamais rien eu d'impossible. Depuis les Barjots et tous les titres qui ont suivi, on pouvait avoir peur que les choses changent, mais cet état d'esprit semble bien inscrit dans l'ADN de ce sport. L'US Orléans organise depuis huit ans un grand tournoi de mini-hand pour les écoles primaires de l'agglomération. Cette année encore, 1700 écoliers ont transformé la plaine de Belneuf en une immense fourmilière colorée, une incessante chorégraphie en plein air avec des balles qui volent de partout. Et il n'est pas rare, au détour d'un terrain, de croiser un des parrains d'Olymphand, venu encourager tous ces minots qui cavalent joyeusement sur l'herbe. Et là-aussi, on n'est pas dans un pipeau où des célébrités plus ou moins locales viendraient signer trois autographes et remettre une coupe, en 35 minutes, Ray-ban et service compris. Tout juste promus en D1, les handballeurs de Saran sont venus partager leur magnifique titre de Pro D2, mais pour l'un d'entre eux, cette journée a une saveur particulière. Originaire du quartier de l'Argonne, Monzale Mbemba aurait très bien pu trente ans plus tôt être à la place d'un de ces gosses venu taquiner la balle. Quant à Steven George, l'ailier droit de l'USAM Nîmes et ancien de Saran, il faisait partie il y a quatre ans de ces jeunes bénévoles qui participent à l'organisation d'Olymp'hand, déjà sous la houlette d'Abder Mecheri. L'occasion de mieux faire leur connaissance, et de voir que ces sportifs de haut niveau sont vraiment des gars bien. Bonjour, pouvez-vous vous présenter ? -Je m'appelle Monzale Mbemba, 38 ans, joueur au HBC Saran, champion de France Pro D2 en ayant été promus cette année. Je joue au hand depuis l'âge de 12 ans, ancien international congolais, et j'ai rejoint le staff de la RDC. Je viens du quartier de l'Argonne à Orléans, et je suis parti de chez mes parents à 17 ans. J'ai été formé à USO. - Steven George, 20 ans. J'ai commencé le handball à Saran car j'ai grandi là-bas. Je suis passé au pôle de Chartres. J'ai intégré le centre de formation de Nîmes l'année dernière, et j'ai profité de blessures pour jouer en équipe pro depuis le début de saison. Avez-vous commencé par le hand ? - Non par le volley, à cause du dessin animé Jeanne et Serge ! Puis il y a eu le foot avec les copains et je suis passé au hand, de novembre à février pour passer l'hiver au chaud dans les salles. J'ai accroché et j'ai fait toute mes classes jusqu'en sénior à l'USO, un club familial. Après une année en N 3, je suis parti à Gien en N 1. Ensuite, j'ai un peu vagabondé en Bourgogne, à Chalons sur Saône, à Saumur en Auxois et à Dijon en D1 avec Monsieur Denis Lathould. Derrière ça retour à Giens puis une saison à Cherbourg, puis je suis revenu dans la région pour la famille. Je voulais arrêter quand Fabien Courtial m'a proposé un nouveau défi à 35 ans à Saran, et vous connaissez la suite, deux montées avec deux titres de meilleur défenseur. Deux années historiques pour le club, une accession en D1 qui se joue sur le dernier match à Massy. - Je faisais un peu de hand dans une école primaire de Saran, aux Sablonières, Bertrand Neuilly, un coach du club, m'a proposé de venir et j'ai tout de suite accroché. De fil en aiguille, j'ai passé les catégories de jeunes, je suis allé en section sportive à Montargis, puis au pôle de Chartres pendant deux ans. La première année au CER s'est bien passée, la deuxième année je me suis fracturé les deux genoux. Du coup, je n'ai pas été repris, et six mois après, lors du match de reprise, je me suis refait le gauche ! Les médecins voulaient que j'arrête le hand, mais au fond de moi, je ne savais pas quoi faire d'autre. Je suis rentré à Orléans où j'ai été accueilli à la section sportive du lycée Benjamin Franklin et j'ai repris à Saran où Fabien Courtial m'a proposé d'intégrer l'effectif de la N1comme troisième ou quatrième gaucher. J'ai fait deux saisons, avant de passer les tests pour le centre de formation de l'ASAM et rejoindre Yann Alexandre, avec qui j'étais à Chartres. Ce qui est marquant dans vos deux parcours, c'est que vous citez quelqu'un qui vous a mis le pied à l'étrier. - Marc Pons, l'actuel président de l'USO, a été mon premier entraîneur. J'avais un petit côté rebelle, et j'aurais pu rester trainer dans le quartier de l'Argonne où les copains roulaient en Mercedes et portaient du Lacoste. J'avais des parents très stricts et si j'étais tombé dans certains trucs, ça aurait été retour en Afrique. Marc était dur, mais m'a toujours montré qu'il croyait en moi. L'USO était un club familial, ça m'a permis tous les jours, tous les week-ends, de jouer, d'arbitrer et de m'occuper des petits jeunes. Aujourd'hui je les en remercie encore, sans eux j'aurais pu mal tourner. - Bertrand Neuilly m'a fait venir au hand et ensuite toujours eu un petit œil sur moi. Il y a aussi un autre coach à qui je voulais ressembler, c'est Romain Leclerc qui jouait en équipe 1 et bossait au gymnase pendant les vacances. J'allais faire des tirs avec lui. Je suis fils de policier et j'habitais dans un quartier plus tranquille. Il y avait moins de sollicitations mais pas question de faire des conneries, sinon ça aurait chauffé ! J'étais aussi dans un club familial, Saran, dans lequel je me sentais bien. Un petit focus sur vos origines. - RDC, je joue pour le Congo depuis 2006. Aujourd'hui j'ai intégré le staff autour de Damien Kabengele dont je suis l'adjoint. On a fait notre premier match contre Angers. Au début ça m'a fait bizarre de ne pas jouer et de donner des consignes. Mais à mon âge, je sens que le moment est venu. Nous avons aussi des projets au club. J'ai encadré les moins de 18 cette année et on s'est qualifié pour les championnats de France l'année prochaine. Dans l'esprit des gens, les défenseurs sont des besogneux qui donnent des coups, mais j'ai une vision plus globale du handball. Aujourd'hui j'ai entamé les démarches pour devenir français, comme ma femme. - Je suis né en France, mes parents sont nés à Basse-Terre en Guadeloupe et se sont rencontrés ici. J'y allais souvent quand j'étais petit, mais au fur et à mesure, avec le hand, c'est devenu compliqué d'y aller et d'en profiter vraiment. Il faut que j'y retourne le plus vite possible ! Ce sont mes origines et je suis fier de représenter les guadeloupéens en D1. J'ai gardé quelques aspects du mode de vie antillais, je dors tout le temps ! - grands rires de tout le monde – J'écoute du zouk et j'essaye de me faire un petit plat de temps en temps. Avec l'âge, j'éprouve le besoin de me rapprocher de mes origines, de mieux parler le créole et j'ai demandé à ma mère de m'apprendre à cuisiner. Malgré votre réussite sportive, vous êtes restés les mêmes, et vous auriez pu être un de ces gamins qui aujourd'hui participent à Olymp'hand . - J'aurais aimé être là il y a presque 30 ans avec mon institutrice Mme Masson. C'est un bonheur de répondre à l'invitation d'Abder. Toute l'équipe de Saran est venu rendre à ces jeunes ce qu'ils nous donnent quand ils viennent nous supporter. Grace à cet événement, ils découvrent ce sport qui a besoin de licenciés la région, autour de l'euphorie de Saran. - Pour moi ce n'est pas un fantasme, j'y étais bénévole il y a quatre ans, je rangeais les tables après le tournoi. C'est plaisant de me retrouver aujourd'hui parmi les parrains. Monza et moi sommes deux gamins de la région, et si on peut montrer le chemin à certains… Votre actu hand, vous allez vous rencontrer la saison prochaine ? - C'est un retour en D1 après l'année 2010 à Dijon. J'ai dit à Steve de ne pas traîner dans mon secteur quand il jouera contre nous, de respecter les anciens. On va se taquiner sur le terrain et s'il passe dans le coin, il prendra ce qu'il a à prendre.- Grands rires- Il a pris en volume musculaire, il a un super jump et a étoffé sa gamme de tir. Il a beaucoup travaillé pour améliorer son explosivité et son 1X1. Malheureusement à Saran on n'a pas trop cru à lui. C'est pas grave et il le sait, il n'a pas baissé les bras et quand on le voit, on est fier de lui. J'espère qu'il ne le voit pas comme une revanche, mais comme un aboutissement avant de voir plus haut. Ce qu'il fait aujourd'hui est génial, je suis content pour lui. Notre ambition est le maintien et de prendre du plaisir. Cette fois on ne pourra pas monter ! - Franchement j'ai presque envie de relever le défi et d'aller me frotter à lui. Je sais que si je vais là-bas il va me relever en souriant après m'avoir découpé! Me frotter à un joueur comme lui me motive et peut me prouver que j'ai progressé. Si je veux le passer, il ne faudra pas que je sois dans son rythme, sinon je risque de recevoir. Notre objectif est de finir dans les sept premiers. Une pensée pour deux garçons qui m'ont beaucoup appris : Yassine Idrissi, mon compagnon de chambre et Guillaume Saurina mon complice d'échauffement, qui quittent le club. A titre perso, je me dis à chaque match que j'ai une chance incroyable de jouer en D1. Il y a peu de temps, j'ai pris une photo avec Hallgrimson quand il jouait à Paris, et aujourd'hui je joue à côté de lui, et il me donne même ses chaussures ! C'est là que je me rends compte de cette chance. Vos modèles ? - Mes deux modèles étaient Stefan Lovgren et Jackson Richardson quand je jouais arrière. La force et la créativité. Après il y a eu Didier Dinart puis Rock Feliho avec qui j'ai des points communs. J'admire beaucoup Cédric Sorhaindo et Viran Morros, j'essaye de m'inspirer du jeu de ces garçons. - Luc Abalo, et tous les ailiers droits qui font du beau jeu. J'ai encore beaucoup de choses à apprendre, avec Franck Maurice et Jérome Chauvet au CF.

Voilà, un vendredi après-midi à Olymp'hand nous a donné l'occasion d'une rencontre sympa. Celle de deux handballeurs attachants, un vrai portrait croisé, celui de deux garçons qui font passer l'autre avant eux-mêmes…

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