On pensait tous avoir atteint les limites de l’horreur le 9 janvier 2015 Plusieurs millions de Charlie avaient arpenté le pavé de Paris ou d’ailleurs, sans se douter que le sang allait bientôt rougir le sable sensé se trouver dessous depuis un mois de mai resté célèbre Le vendredi 13 novembre de cette même année, il ne faisait pas bon boire un verre ou écouter du rock dans le XIe arrondissement de Paris Pas bon du tout Le temps du recueillement est nécessaire Celui de la compassion pour des victimes et leurs familles, des français comme vous et moi Celui des interrogations et des réactions viendra ensuite, sûrement, du moins je l’espère L’histoire, si elle peut s’avérer impitoyable, fournit parfois l’occasion unique et inespérée de devenir grand, un grand homme, des grands hommes comme dirait Patrick Celle en tout cas de rétablir un lien de confiance entre un peuple et ses élus, plus que rongé par une défiance qui prend des proportions inquiétantes. L’unité nationale est émouvante et elle serait utile si elle n’était pas que de façade. Sans tomber dans le classique de comptoir, « moi je vous le dit mon bon Monsieur, une bonne guerre nous ferait du bien », cette période trouble est une occasion de donner du sens à certaines valeurs, de changer certaines choses en profondeur, de construire un avenir meilleur pour et par un peuple qui s’y reconnaît enfin Beaucoup de ceux qui courageusement bravent le danger en posant leurs coudes sur du zinc réclament à nos icônes à crampons, celles qui taquinent le ballon rond moyennant quelques euros, un peu d’exemplarité Il serait temps que nos élus fassent de même, en particulier quand cette occasion leur est donnée Il sera temps après de réfléchir à ce qu’il aurait fallu faire avant Pas avec des canifs quand crépitent les kalach Sans que l’Islam de France ne fasse l’économie d’une révolution culturelle et ne sécularise certains préceptes directement issus d’un califat du moyen âge Sans tomber dans le panneau de l’amalgame Le brave Dédé doit se retourner dans sa tombe, Maginot, celui de la ligne du même nom. Il aurait été urgent et salvateur de mieux connaître notre ennemi pour savoir quand, comment et où il allait frapper Tenter de savoir, tenter de connaître devrais-je dire, tant le fameux risque zéro est impossible à envisager Apprentis sorciers de tous bords, les bleus marine comme les autres, fermez-là cette fois-ci, s’il vous plait Comme chacun sait, comparaison n’est pas raison, et pourtant je ne peux pas m’empêcher de tomber dans le panneau Rassurer le pays est sûrement une chose importante quand on est au pouvoir André, Ministre de la guerre, avait conçu sa ligne dans les années 20, l’avait construite dans les années 30, tout ça pour que nos ennemis d’outre Rhin puissent mieux la contourner en 40 Il aurait mieux fait de la sniffer Plus d’un demi- siècle après, l’ennemi n’est plus blond à moustache et la réponse visible aux attentats de janvier a été l’opération sentinelle 4,8 milliards de rallonge budgétaire pour la Défense 700 militaires mobilisés, principalement pour la protection des écoles et des lieux de culte juifs Comme souvent dans ce pays, il n’y pas grand monde pour poser la question de l’efficacité d’une politique, et encore moins pour y répondre objectivement Et encore c’était avant l’état d’urgence ! Aujourd’hui, c’est open-bar, à toute heure du jour ou de la nuit. Le RAID qui pète votre baie vitrée au moment où vous alliez ouvrir votre boite de petit salé pourtant pur porc La BRI qui canarde vos volets à l’instant précis où vous étiez sur le point d’honorer cette épouse fidèle qui attendait ça depuis de longues semaines Tout le monde se félicite que les forces de l’ordre joignent enfin le geste à la parole de nos dirigeants et aillent traquer le gros gibier là où on imagine qu’il se trouve Même si on pourrait être en droit de se demander pourquoi ne pas l’avoir fait plus tôt Dans certains quartiers conviviaux plus que sur le bord des autoroutes, au moment où de dangereux pères de familles rejoignent le camping de Saint-Jean de Monts, le coffre de leur puissante berline souvent bourré d’un arsenal qui ferait frémir les forces spéciales russes Cannes à pêche Boules de pétanques Canots pneumatiques Sandales en plastique De quoi sauvagement envahir la plage des dames, à Noirmoutier André aurait sans doute dû se pencher sur ce qui pouvait se trouver sous les casques jadis à pointe, tant mieux connaître son ennemi fait sans doute partie des préceptes de l’Art de la Guerre Et qui reste d’actualité Mais ceux qu’il faudrait surveiller ne sont pas forcément ceux que l’on croit, c’est une guerre plus sournoise que l’on imagine qui s’annonce Celle de la revanche des frustrations Menée par des français en perte de repères, tous passés par l’ascenseur social qu’est l’Ecole, celle que le monde entier nous envie Celle de la République De la console au XIe, arrondissement pas siècle Du canap à la rue Assassin’s creed pour de vrai ! De l’échec répété à la vengeance Des hordes de schizophrènes qui maîtrisent moyennement la frontière entre réel et virtuel Et qui ne portent pas tous la barbe Pas comme ce bon vieux Père Noël, avec sa hotte sur le dos Pleine de robes de princesse, de panoplies de spider man Et de jeux vidéo